Travailler pour une autre société pendant un arrêt maladie : à quelles conditions ?

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Chef d’entreprise, vous avez découvert que l’un de vos salariés travaillait pour le compte d’une autre société pendant un arrêt maladie ? Un arrêt de la Cour de cassation du 26 février 2020 a précisé les contours de l’obligation de loyauté du salarié envers son employeur durant l’arrêt maladie. Avocats Picovschi fait le point pour vous.

Qu’est-ce que l’obligation de loyauté ?

L’article 1104 du Code civil dispose que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. L’article 1194 du Code civil ajoute en outre que « les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l'équité, l'usage ou la loi ».

Cette notion de bonne foi est reprise en droit du travail à travers l’article L. 1222-1 du Code du travail, qui établit que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. Il ne s’agit pas pour l’employé d’une obligation d’adhérer pleinement aux valeurs de l’entreprise, mais seulement de ne pas commettre d’agissements susceptibles de porter préjudice à son employeur. 

À titre d’exemple, l’obligation de loyauté peut être invoquée lorsque le salarié qui enregistre secrètement les conversations de ses supérieurs sur l’exercice de ses fonctions, d’offrir des pots-de-vin ou encore de frauder au pointage.

Étendue au fil des jurisprudences, cette notion est extrêmement vaste et diffère selon la nature de l’emploi du salarié, sa fonction, sa place dans la hiérarchie. Les cadres sont d’ailleurs soumis à une obligation de loyauté renforcée.

La violation de l’obligation de loyauté du salarié permet en outre un licenciement pour cause réelle et sérieuse, voire pour faute grave ou lourde. Elle permet alors d’obtenir le départ immédiat du salarié de l’entreprise, sans préavis ni indemnités, et dans certains cas, d'obtenir du salarié qu’il verse à l’employeur des dommages et intérêts.

Le vol, l’escroquerie ou la corruption du salarié peuvent également conduire à la constatation d’un manquement à l’obligation de loyauté sur le terrain pénal.

L’obligation de loyauté est souvent associée aux obligations d’exclusivité et de non-concurrence. Néanmoins, l’exclusivité ne signifie pas obligation de n’avoir aucune autre activité professionnelle.

Le salarié peut-il exerce une autre activité professionnelle ?

Le principe de liberté du travail et les droits de la personnalité tels que celui au respect de la vie privée permettent à l’employé, hors de l’autorité de son employeur, d’exercer une autre activité.

La jurisprudence a donc confirmé qu’une collaboration bénévole et épisodique dans une petite entreprise non concurrente ne constitue pas un motif réel et sérieux de licenciement.

En revanche, l’obligation de non-concurrence, corollaire à l’obligation de bonne foi et de loyauté, consiste pour le salarié à ne pas exercer d’activité concurrente en cours de contrat.

C’est par exemple le cas d’un salarié qui pousserait les autres salariés de son entreprise à venir rejoindre la sienne lors de sa période de préavis.

Mais qu’en est-il en cas de suspension de l’obligation à fournir sa prestation de travail, notamment lors de congés sabbatiques ou d’arrêt maladie ?

En effet, le contrat est suspendu, selon les termes de l’article L.210-32-17, pendant cette période. Malgré tout, l'obligation de loyauté et de non-concurrence continue de courir pendant cette période, même si le contrat de travail ne le spécifie pas.

C’est de cette subtilité dont traite l’arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 26 mars 2020 (Cass. soc., 26 févr. 2020, n° 18-10.017 P+B).

En l’espèce, une secrétaire en arrêt maladie avait travaillé pour le compte d’une société qui n’était pas son employeur. La Cour de cassation pose alors une série de critères pour déterminer le manquement à l’obligation de loyauté dans ces circonstances.

Ainsi, il n’y a pas manquement à l’obligation de loyauté lorsque l’activité exercée par le salarié hors de son temps de travail est :

  • Non-concurrente ;
  • Ne pose pas de préjudice à l’employeur ou à l’entreprise ;
  • Ce préjudice ne peut résulter du seul paiement par l’employeur des indemnités complémentaires aux allocations journalières

Le préjudice doit donc résulter du caractère concurrentiel de l’activité du salarié, faute de quoi l’employeur pourra difficilement obtenir un licenciement pour cause réelle et sérieuse.

La juridiction précise par ailleurs que l’exercice de l’activité à titre bénévole ou non, occasionnellement ou non, importe peu. Cette jurisprudence va dans le même sens qu’un arrêt de la chambre sociale du 12 octobre 2011. L’obligation de loyauté fait donc l’objet d’une analyse restrictive par la chambre sociale.

Attention cependant : cet arrêt ne vise pas les cas où l’arrêt maladie serait pris afin de pouvoir exercer une activité supplémentaire, et l’employeur peut tout à fait demander une contre-visite, prévue à l’article L. 1226-1 du Code du travail, à savoir un contrôle médical pour vérifier l’authenticité de la maladie de son employé. Ce dernier risque alors de perdre ses indemnités complémentaires à l’allocation journalière versée en cas d’arrêts maladie.

Si en tant qu’employeur vous désirez remercier un salarié déloyal, il semble fondamental de saisir toutes les subtilités légales et jurisprudentielles en la matière.

Avocats Picovschi, compétent en droit du travail depuis plus de 30 ans, vous propose un accompagnement complet afin de défendre vos intérêts.

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