Litiges transfrontières sur Internet (2): le tribunal compétent
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Suite du feuilleton sur les litiges transfrontières sur Internet : après avoir vu quel droit on pouvait appliquer, place maintenant à la détermination du juge compétent pour ce type de litige. Quel juge saisir lorsqu'on souhaite assigner en justice un site Internet étranger? Suivez le guide !
Le principe : compétence du tribunal du domicile du défendeur
En droit international privé, le juge compétent est déterminé par le Règlement CE n°44/2001, du 22 décembre 2000, sur la compétence judiciaire et l'exécution des jugements. Ce texte communautaire pose le principe que le juge compétent pour régler un litige transfrontière est celui du domicile du défendeur.
Néanmoins, le Règlement communautaire prévoit des compétences spéciales tant en matière contractuelle que dans le domaine délictuel.
Compétences spéciales en matière contractuelle
S'agissant des contrats, le demandeur peut attraire le défendeur devant le lieu d'exécution de la prestation.
Quand il s'agit de contrats passés avec les consommateurs, l'article 15 du Règlement de 2000 permet au consommateur de saisir le tribunal de son domicile à condition que le site Internet ait dirigé son activité vers le pays où le consommateur réside.
Pour déterminer si l'activité du site Internet est dirigée vers le pays du consommateur, le juge s'appuie sur plusieurs critères :
- la langue est le premier critère pris en compte. Il suffit que le site Internet propose ses produits ou services dans la langue du consommateur.
- Le moyen de paiement peut également être un critère puisque le fait que le site Internet propose de payer dans la monnaie du pays du demandeur est un élément prouvant que le site Internet est dirigé vers le pays de son consommateur.
A noter qu'il y a un grand débat sur le fait de savoir si les parties peuvent déterminer par contrat quel sera le juge compétent en cas de survenance d'un litige. Cette possibilité est déjà prévue pour la détermination du droit applicable, mais ses détracteurs estiment que le juge ne doit pas être lié par les contrats.
Compétence spéciale sur le terrain délictuel
A l'instar de ce qui a été établi pour la détermination du droit applicable, l'article 5, paragraphe 3, du Règlement de 2000 prévoit la possibilité pour le demandeur de saisir le tribunal du lieu du dommage.
Comme pour la détermination du droit applicable, cette compétence se dédouble et on peut donc aussi bien saisir le tribunal du lieu du fait générateur du dommage que celui du lieu où le dommage a été subi.
La jurisprudence communautaire a interprété très largement cette disposition relative à l'information litigieuse.
Cette extension de la compétence des juges fut posée par le célèbre arrêt Fiona Sheville rendu par la Cour de Justice des communautés européennes (CJCE) le 7 mars 1995. Les magistrats européens dégageaient ainsi une sorte de compétence universelle.
Après avoir suivi dans un premier temps la position des juges communautaires (voir par exemple Cass. Civ. 1ère, 9 décembre 2003), les juges français ont cherché à resserrer leur champs de compétence en matière de litiges transfrontières. Ainsi, un arrêt de la Cour d'appel de Paris, rendu le 26 avril 2006, imposait une condition plus restrictive pour que le juge du lieu où est accessible l'information soit compétent. En effet, le juge d'appel exigeait que l'on caractérise « un lien suffisant, substantiel ou significatif, entre les faits ou l'acte litigieux et le dommage allégué ». Cet arrêt était ensuite confirmé en 2007 par un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, rendu le 20 mars 2007.
Néanmoins, il semble que la jurisprudence française ne soit pas encore clairement établie sur le sujet puisque deux ordonnances du 16 mai 2008, rendues par le TGI de Paris, viennent à nouveau semer le trouble en retenant la compétence du juge français sur le seul critère de l'impact économique en France de l'information litigieuse.
Par conséquent, à l'instar du droit applicable, la détermination du juge compétent dépend du domaine dans lequel on agit mais il faudra tenir compte des exceptions. L'appel à un avocat compétent à la fois dans le domaine de l'Internet et en droit international privé reste la meilleure solution pour parvenir à défendre au mieux ses intérêts.