Fraude fiscale : les « conseilleurs » dans le collimateur de la justice

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Jean Martin
Jean Martin
Ancien Inspecteur des Impôts

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Sommaire

Dans son bulletin officiel des Finances publiques (BOFIP) CF-INF-40-40 du 28 août 2024, Bercy a apporté des commentaires par rapport à l’article 113 de la loi de Finances pour 2024 qui a institué « le délit de mise à disposition d'instruments de facilitation de la fraude fiscale ». Décryptage des conséquences pratiques résultant de ce nouveau moyen législatif, destiné à renforcer l’arsenal mis en place pour lutter contre la « délinquance fiscale ».

Facilitation de la fraude fiscale : qui est concerné ?

Le nouveau délit institué par le Législateur a pour objectif de sanctionner les intermédiaires qui facilitent la fraude fiscale commise par leurs clients « en mettant à leur disposition des schémas ou dispositifs fiscaux frauduleux ».

Sous cette terminologie un peu évasive, sont notamment tout de même visés assez clairement :

  • les intermédiaires qui proposent des schémas de fausse domiciliation fiscale à l’étranger, des montages visant à majorer indûment les charges ou éluder tout ou partie des recettes d’une entreprise, la confection de dossiers de crédits d’impôt fictifs ou encore des schémas de fraude à la défiscalisation outre-mer ;
  • les personnes qui créent à titre individuel des comptes privés sur les réseaux sociaux, incitant ouvertement leurs abonnés à bénéficier de restitutions d’impôt sur le revenu, en contrepartie d’une rémunération.

Dans son instruction administrative du 28 août 2024 l’administration fiscale précise que « Précédemment, ces promoteurs de montages frauduleux ne pouvaient en effet être poursuivis qu’au cas par cas au titre de la fraude fiscale commise par chacun de leurs clients, alors même qu’ils peuvent apporter leurs concours à de nombreux contribuables ».

En d’autres termes, le délit de mise à disposition d'instruments de facilitation de la fraude fiscale codifié à l’article 1744 du Code général des impôts (CGI) est indépendant du délit de fraude fiscale proprement dit, stipulé à l’article 1741 dudit Code.

Quels sont les éléments constitutifs du délit ?

Avant tout, Bercy souligne que ce nouveau délit se caractérise par la mise à disposition à titre gratuit ou onéreux, d’un ou de plusieurs moyens, services, actes ou instruments juridiques, fiscaux, comptables ou financiers ayant pour but de permettre à un ou plusieurs tiers de se soustraire frauduleusement à l’établissement ou au paiement total ou partiel des impôts mentionnés au Code général des impôts.

Soit l’élément matériel

Il s’agit de :

  • l'ouverture de comptes ou la souscription de contrats auprès d'organismes établis à l'étranger ;
  • l'interposition de personnes physiques ou morales ou d'organismes, de fiducies ou d'institutions comparables établis à l'étranger ;
  • la fourniture d'une fausse identité ou de faux documents au sens de l’article 441-1 du Code pénal ou de toute autre falsification ;
  • la mise à disposition ou la justification d'une domiciliation fiscale fictive ou artificielle à l'étranger ;
  • la réalisation de toute autre manœuvre destinée à égarer l'administration.

C’est dire que le Législateur a balayé large !

Et le BOFIP du 28 août 2024 « enfonce le clou » en indiquant que cette mise à disposition peut s’effectuer indifféremment à titre gratuit (par exemple, un service au sein d’une entité qui élabore tel ou tel montage au profit de cette entité ou d’une entité liée, sans contrepartie financière) ou à titre onéreux, soit avec une contrepartie financière qu’elle soit fixe ou à proportion, par exemple de l’impôt qu’elle permettrait de frauder.

Soit l’élément intentionnel

Le délit prévu à l’article 1744 du CGI suppose que les moyens, services, actes ou instruments juridiques, fiscaux, comptables ou financiers soient mis à la disposition de tiers dans le but de leur permettre de se soustraire à l’établissement et au paiement de tous les impôts et taxes existants.

Quelles sont les personnes susceptibles d'être poursuivies ?

Pour les personnes physiques, le fisc cite l’exemple « des usagers créant des comptes privés sur les réseaux sociaux incitant ouvertement leurs abonnés à bénéficier frauduleusement de restitutions d’impôt sur le revenu sous réserve que l’abonné leur transmette ses identifiants et mot de passe sur www.impots.gouv.fr accompagnés d’un RIB et d’un justificatif d’identité. En contrepartie, le détenteur du compte privé bénéficie d’une rémunération proportionnelle à la restitution d’impôt sur le revenu obtenue par l’usager ».

Pour les personnes morales qui sont susceptibles d’être impliquées, tels des cabinets de conseil ou des structures commercialisant des montages de défiscalisation, Bercy évoque aussi de manière « non innocente » un autre exemple très concret, à savoir « la mise en place par une officine de conseil en défiscalisation et son principal dirigeant, avec la complicité d’une banque établie hors de France, d’une offre de services dont ils assuraient la promotion commerciale, y compris sur Internet, consistant en la création de structures à l’étranger chargées, soit d’émettre des factures fictives à destination de sociétés françaises pour leur permettre de diminuer leur résultat fiscal et transférer les fonds correspondant à l’étranger, soit de facturer en lieu et place des sociétés françaises des prestations à leurs clients, permettant aux entreprises françaises de diminuer leur chiffre d’affaires et à leurs dirigeants de l’appréhender frauduleusement hors de France.

Comment est réprimé le délit ?

Seul le ministère public a qualité pour engager l’action publique relative au délit de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude fiscale. Contrairement au délit de fraude fiscale poursuivi selon des règles pénales spéciales, les poursuites peuvent être engagées sans action préalable de l’administration fiscale.

En conséquence, l’autorité judiciaire est compétente pour engager des poursuites à son initiative sur le fondement des dispositions de l’article 1744 du CGI, même si en pratique le fisc conserve la possibilité de déposer plainte au titre de ce délit ou de dénoncer des faits susceptibles de caractériser celui-ci.

Pour mémoire, conformément aux dispositions de l’article 8 du Code de procédure pénale, l'action publique se prescrit par six années révolues à compter du jour où l'infraction a été commise.

Quelles peines applicables ?

La personne physique, auteur du délit, est passible d’un emprisonnement de trois ans et d’une amende de 250 000 €.

Cette peine peut être portée à cinq ans d’emprisonnement et à 500 000 € d’amende lorsque la mise à disposition a été effectuée en utilisant un service de communication au public en ligne.

Corrélativement, les personnes morales reconnues coupables encourent d’une part une amende égale au quintuple de celle prévue pour les personnes physiques, d’autre part les peines ci-après, soit la dissolution ; l'interdiction définitive ou temporaire d’exercer l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise ; le placement temporaire sous surveillance judiciaire ; la fermeture définitive ou temporaire d’établissements ; l'exclusion définitive ou temporaire des marchés publics ; l'interdiction définitive ou temporaire de procéder à une offre au public de titres financiers ou de faire admettre ses titres financiers aux négociations sur un marché réglementé ; l'affichage ou la diffusion de la décision prononcée et enfin l'interdiction temporaire de percevoir des aides publiques.

Que penser de tout cela ?

« La couleur » est clairement annoncée à l’encontre des organisateurs et entremetteurs qui seraient encore tentés de gagner facilement de l’argent en faisant miroiter aux contribuables professionnels et particuliers une optimisation fiscale alléchante, par le biais de montages plus ou moins ingénieux … mais frauduleux en toute hypothèse.

On ne peut évidemment pas critiquer la volonté des Pouvoirs publics d’accentuer les moyens législatifs pour lutter contre le fléau que représente la fraude fiscale pour les caisses de l’État et l’équité entre tous les contribuables.

Mais de leur côté, les Avocats fiscalistes continueront toujours à défendre les droits et intérêts de leurs clients, pris dans la tourmente d’un contrôle fiscal déclenché parfois justement à cause de graves irrégularités commises dans leurs déclarations souscrites au plan professionnel et/ou personnel, à cause de décisions irréfléchies résultant des promesses attractives d’officines sans scrupules.

Si jamais en tant que simple particulier ou en qualité de chef d’entreprise, vous vous retrouvez confronté à cette situation particulièrement fâcheuse, Avocats Picovschi compétent en Droit fiscal depuis 1988 se tient prêt à répondre immédiatement et le plus efficacement possible à votre appel au secours.

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