Contrôle fiscal personnel : gare aux sommes en banque importantes

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Jean Martin
Jean Martin
Ancien Inspecteur des Impôts

Nous bénéficions de l'expertise de notre of counsel, Jean Martin, ancien Inspecteur des Impôts.

| Mis à jour le 11/07/2023 | Publié le

Sommaire

L'article L. 16. 3° alinéa du Livre des procédures fiscales (LPF) confère un pouvoir exorbitant aux inspecteurs des Finances publiques à l’occasion de leurs investigations dans les comptes bancaires et assimilés d’une personne physique, lors de son examen contradictoire de situation fiscale personnelle (ESFP). Avocats Picovschi estime opportun d’effectuer le point sur les risques encourus et les moyens de se défendre en cas de contrôle.

À quelles informations l’administration fiscale a-t-elle accès ?

TRACFIN (Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins), Service rattaché à Bercy, destiné à détecter le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme travaille essentiellement à partir des déclarations de soupçons que les professionnels assujettis à cette obligation, sont tenus de respecter.

Concrètement, il est rappelé que les banquiers, assureurs, conseils en investissement, avocats, notaires, huissiers, commissaires aux comptes, experts-comptables, commissaires-priseurs, agents immobiliers, antiquaires …) doivent s’abstenir d’effectuer toute opération présumée « douteuse ».

En quelque sorte, ces professionnels sont invités d'une part à se comporter en pourvoyeurs d'affaires pour le fisc, d'autre part, à bien vouloir collaborer avec la Justice. S'il s'avère que telle ou telle déclaration de soupçon correspond effectivement à des mouvements financiers suspects, celle-ci est transmise en fonction de la teneur des informations, aux autorités judiciaires, à la Direction générale des Douanes, aux divers organismes sociaux … et bien entendu à l'administration fiscale.

Plus particulièrement pour les banques et les établissements de crédit, un décret du 25 mars 2015, issu de la loi bancaire de juillet 2013, a introduit une nouvelle exigence. C’est ainsi que les opérations de dépôts d’espèces et de retraits d’espèces supérieures à 10 000 € cumulés sur un mois doivent faire l’objet d’une information systématique à TRACFIN !

Ce dernier point ajouté aux autres obligations de principe plus anciennes entraîne un gros problème de fond dans la mesure où les banques se voient contraintes de « jouer le jeu » en donnant des noms de temps à autre, ne serait-ce que pour coller à des pourcentages au plan statistique.

Ainsi, sans mettre en doute la loyauté des établissements financiers, la tentation peut être forte (pour apporter les preuves de leur bonne volonté à respecter la loi) de livrer en pâture quelques mauvais clients « peu intéressants » pour lesquels il est constaté quelques mouvements a priori anormaux, en prenant en contrepartie le risque mesuré de ne pas alerter TRACFIN pour des opérations plus importantes tout aussi suspectes, mais effectuées par des clients « plus intéressants ».

Ceci dit, contrairement à ce qui peut circuler parfois sur les réseaux sociaux et hormis des situations très exceptionnelles, notamment si vous faites l’objet d’une procédure pénale pour une grave « histoire d’argent », votre banque ne peut en aucune manière prendre l’initiative d’adresser à l’administration fiscale directement les relevés de vos comptes.

En clair, cette communication ne peut être effectuée que dans l’hypothèse où un inspecteur des Finances publiques vous a envoyé impérativement au préalable un avis de vérification de comptabilité ou d’examen de comptabilité ou encore d’examen contradictoire de situation fiscale personnelle (ESFP).

Attention à deux dangers !

Si jamais l’administration fiscale a jeté son dévolu sur votre dossier car elle subodore à tort ou à raison que vous avez minoré ou dissimulé des revenus à caractère imposable, vous avez de fortes chances de subir un contrôle fiscal. Et ce, justement pour se donner le droit officiellement d’examiner les mouvements des comptes bancaires utilisés à titre professionnel et/ou personnel afin de conforter ses présomptions provenant le cas échéant, entre autres … de renseignements parvenus à TRACFIN.

Dans le cadre plus précisément d’un ESFP, très difficile à vivre au plan psychologique, l’inspecteur a la possibilité de vous interroger par écrit sur la nature et l’origine exactes des sommes créditées sur l’ensemble de vos comptes bancaires et assimilés, utilisés à titre personnel et ce, pour chacune des années soumises à contrôle via une demande de justifications n° 2172-SD particulièrement contraignante.

Concrètement, ce représentant du fisc peut vous prier de bien vouloir produire toutes explications et justifications probantes quant aux mouvements mentionnés au crédit de vos comptes de trésorerie, à partir de deux motifs très ciblés, visés expressément par les dispositions de l'article L. 16. 3° alinéa du LPF.

Sa première arme redoutable résulte de l’application du principe de la règle relativement ancienne, dite "du double".

En clair, il a déjà le droit de vous questionner si le montant total des sommes portées au crédit de vos comptes financiers utilisés à titre personnel - après extourne des virements de compte à compte et des sommes afférentes à de simples écritures de régularisation – est au moins égal pour l’année en cause, au double de celui de vos revenus déclarés.

À défaut de pouvoir faire référence à la règle précitée, l’inspecteur a également la faculté de vous interroger si le montant total de vos crédits bancaires excède celui de vos revenus déclarés, d'au moins la somme de 150 000 €.

Exemple : vous avez déclaré au titre de l'année N un montant total de revenus égal à 166 154 €. Et le montant total de vos crédits bancaires est égal à 319 512 €.

Dans cette configuration, comme en application de la règle "du double", vous devez donc aussi en réponse à la demande de justifications n° 2172-SD, vous trouver en mesure d’apporter un maximum d’explications et d’éléments probants, attestant de la nature et de l’origine exactes des sommes créditées sur vos comptes bancaires et assimilés.

Si les deux motifs énoncés précédemment ne sont pas satisfaits, l’administration fiscale ne peut pas mettre en œuvre à votre encontre les dispositions de l'article L. 16. 3° alinéa du LPF.

En d’autres termes, si le représentant du fisc essaie de passer outre en vous adressant tout de même des demandes de justifications pour les années visées par votre ESFP, l’Avocat fiscaliste en charge de la défense du dossier ne va évidemment pas se priver de faire "tomber" toute la procédure.

Et si l’un des deux critères est réuni ?

Vous avez alors intérêt à mettre tout en œuvre dans le délai de 2 mois stipulé à l’article L. 16 A. du LPF pour peaufiner les réponses les plus pertinentes possibles au titre des années concernées.

Cependant, vous êtes alors confronté au problème de fond auquel se heurtent les contribuables, soit devoir produire des preuves matérielles quant à la nature et l'origine d'opérations strictement privées. Souvent, en effet, aucune précaution particulière n'a été prise à l'occasion par exemple, de mouvements entre membres de la famille et amis (remboursements divers à la suite de sorties communes, prêts ou remboursements de prêts, sommes reçues lors d'anniversaires, de mariages …), de la vente de meubles et d'objets à de tierces personnes, etc …

Or, en l’absence de réponse, vous encourez le danger d’une taxation d'office à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux, en application des dispositions de l’article L. 69 du LPF, de l’ensemble des crédits bancaires non justifiés.

Faute de pouvoir fournir des documents officiels démontrant le caractère non imposable des sommes incriminées, vous devez rassembler un faisceau d'indices concordants, de nature à persuader l’inspecteur que vous n'avez pas tiré des revenus d'une quelconque activité occulte. Ce peut être des attestations, des reconnaissances de dettes, de simples échanges de courriers, des témoignages précis et signés, sous réserve de corroborer le plus possible ces éléments, notamment à minima avec des copies de relevés bancaires et de chèques attestant de la réalité des opérations en cause.

Le but de la manœuvre consiste à apporter un maximum de preuves pour démontrer que les sommes créditées sur vos comptes de trésorerie utilisés à titre personnel correspondent finalement à des revenus régulièrement déclarés ou à des opérations non taxables.

Dans l’hypothèse où le représentant de l’administration fiscale estime que vos réponses ne sont pas satisfaisantes, il est obligé de vous accorder un délai supplémentaire de trente jours en vous invitant à produire pour chacune des années en cause, via une mise en demeure n° 2172 bis-SD, les explications et/ou justifications complémentaires.

À ce stade crucial de la procédure, il est encore temps si vous ne l’avez pas estimé opportun auparavant, de recourir au savoir-faire d'un avocat en Droit fiscal. Celui-ci est tout désigné pour vous aider à préparer les réponses susceptibles de participer à convaincre votre inspecteur de renoncer à toute taxation de sommes ne revêtant pas un caractère imposable.

En raison de la nature même de ce contrôle très inquisitorial que représente un examen contradictoire de situation fiscale personnelle (ESFP), communément appelé contrôle fiscal des particuliers, avec notamment le risque d'être questionné sur ses "rentrées bancaires", le soutien logistique d’un professionnel expérimenté en la matière apparaît indispensable.

Pour cette mission capitale, n’hésitez pas à vous reposer sur la compétence accumulée par Avocats Picovschi depuis 1988 à l’occasion de la défense de ses clients, confrontés à un contrôle fiscal.

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