Conseillers financiers : attention au défaut de conseil !

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Vous avez investi d’importantes sommes d’argent et les rendements de votre placement sont bien inférieurs aux prévisions de votre conseiller ? Vous estimez n’avoir pas été suffisamment informé quant aux risques de votre investissement ? La loi française fait peser un devoir de conseil sur les professionnels vis-à-vis de leurs clients. En cas de manquement à ce devoir, banquiers, conseillers financiers ou assureurs engagent leur responsabilité contractuelle. Avocats Picovschi fait le point.

En quoi consiste le devoir de conseil et d’information ?

Les contrats de placements et de crédits souscrits par les clients non professionnels sont généralement d’une grande complexité, et relativement opaques quant aux risques encourus. Ainsi, banquiers et financiers ont l’obligation d’informer leurs clients sur les placements effectués pour eux en leur fournissant une information « claire, exacte et non trompeuse » selon les termes de l’article L.533-12 du Code monétaire et financier.

Plus précisément ce sont les agents qui rendent un service de conseil en investissement financier qui sont tenus à ce devoir (Cour d’appel de Toulouse, 2ème chambre, 20 janvier 2021, RG n° 18/02025).

Le professionnel doit donc transmettre à son client une notice d’information contenant les caractéristiques du placement dans un contrat signé. Les informations doivent en outre être communiquées sur un support durable (papier, document PDF, etc.)

Depuis le 1er janvier 2018, un document standardisé au niveau européen dit « DIC » (Document d’Informations Clés) doit être transmis aux futurs investisseurs afin de les informer des principales caractéristiques du produit de manière claire et synthétique et du niveau de risque évalué sur une échelle de 1 à 7. Le document doit nécessairement contenir :

  • Une description du produit ;
  • Une estimation des risques et gains éventuels ;
  • Les frais engagés
  • La période de détention conseillée

Attention donc à ne pas signer un tel document trop vite puisqu’il constitue la preuve de la remise de cette notice d’information. Vous ne pourrez donc, en cas de litige, affirmer ne pas avoir été informé du risque du placement, potentiellement accru par les fluctuations boursières (Cass., com., 19 juin 2012, n° 11-30374).

Outre ce devoir d’information général, le professionnel doit offrir à son client un service personnalisé puisqu’il relève du même article qu’il lui appartient « de prendre en compte la situation personnelle de celui-ci (…) », comprenant ses connaissances, ses moyens ainsi que le but poursuivi par cet investissement. La Cour de cassation a par exemple retenu que manquer de s’enquérir de la situation financière de son client ainsi que son expérience de la question engageait la responsabilité du banquier pour lui avoir ôté la possibilité d’opter pour un produit moins risqué.

L’obligation de conseil du banquier se trouve en outre régulièrement étendue par la jurisprudence et la simple présentation de gammes de produits financiers à un client suffit à engager la responsabilité du banquier concernant son obligation de conseil si ce dernier venait à souffrir d’éventuelles pertes financières.

L’obligation de conseil en matière de crédit est relativement similaire à celle des contrats de placements. Elle varie en fonction de l’expérience de l’emprunteur en matière d’investissement, ses objectifs, ainsi que de son patrimoine, bien que les conseils doivent obligatoirement être prodigués avec « pertinence, prudence et loyauté » (Cour de cassation, chambre commerciale, 20 juin 2018). L’instrument financier doit nécessairement être adapté au profil de l’investisseur.

Un devoir de mise en garde vient s’ajouter à l’obligation de conseil du banquier dans le cadre des contrats de crédit. Ces derniers doivent en effet avoir connaissance des conséquences du crédit sur leur patrimoine ainsi que de l’éventualité d’un endettement.

Il convient de noter que l’obligation de mise en garde est limitée aux seules opérations spéculatives, donc comportant un risque élevé de pertes. Les fluctuations propres aux mouvements du marché ne tombent donc pas sous le coup de cette qualification.

Dans un arrêt du 20 janvier 2021, la Cour d’appel de Toulouse a ainsi pu juger que le fait, pour un conseiller financier, de préconiser un placement non agréé par l’AMF à des clients non professionnels et reconnus comme ne disposant pour seule épargne que d’une assurance-vie et ayant une aversion limitée aux risques, constitue une faute.

Ainsi, la seule mention sur des documents délivrés auxdits clients de l’absence d’agrément de l’AMF ne suffirait pas à satisfaire les obligations de mise en garde et de conseil. Il semble donc important de s’assurer que votre conseiller financier diligente toutes les communications approfondies requises avant de vous engager dans une opération d’investissement ou de crédit.

Mauvais résultats : quand la faute du gestionnaire est-elle retenue ?

Une simple déception concernant les résultats de l’investissement ne suffit pas à engager la responsabilité du professionnel. La faible rentabilité d’un portefeuille d’actions et les mauvaises performances liées à un contexte boursier défavorable ne suffisent donc pas à engager la responsabilité du professionnel.

Il convient donc d’établir une faute découlant d’un manquement à son obligation de moyen.

Le professionnel doit donc s’engager à mobiliser toutes ses ressources pour accomplir la prestation, à l’inverse de la garantie de résultat, qui le contraint à atteindre un résultat déterminé.

La faute doit être caractérisée, c’est-à-dire exposer autrui « à un risque d’une particulière gravité que l’auteur ne pouvait ignorer ». La faute caractérisée ne requiert donc pas l’intention du banquier/ conseiller financier ou assureur, mais simplement une attitude négligente et peu soucieuse des conséquences potentielles que le manquement à son devoir de conseil pourrait entraîner sur le patrimoine de son client.

Il convient cependant de noter que la durée du devoir de conseil varie en fonction de la mission du professionnel ainsi que des stipulations contractuelles. Ainsi la Cour d’appel de Paris a par exemple retenu que l’effondrement des marchés consécutifs aux attentats du 11 septembre 2001 ne pouvait avoir fait l’objet de prévisions par les acteurs économiques, mais que l’envoi régulier d’avis d’opérations et de divers comptes-rendus suffisait à remplir l’obligation de conseil de la banque, tenue contractuellement à une obligation d’information régulière.

En revanche, le gestionnaire de portefeuille dans le cadre d’un mandat de gestion n’est tenu à un devoir de conseil qu’au moment de la signature du contrat, puisque sa mission consiste par la suite à gérer discrétionnairement le portefeuille (CA Paris 10-4-2008). Il peut cependant être tenu de conseiller son client lorsque l’état du marché rend propice la vente de la totalité du portefeuille d’actions de son client (CA Paris 11-3-1992).

En d’autres termes, les contrats relevant d’une gestion directe ne découlent sur une obligation de conseil qu’à la demande expresse du client, alors que les contrats de gestion assistée engagent la responsabilité civile du prestataire lorsque celui-ci fait défaut.

La jurisprudence retient que le manquement au devoir de conseil peut aller de l’annulation du contrat à l’engagement de la responsabilité civile de l’assureur avec indemnisation en réparation du préjudice subi ou de la perte de chance.

Avocat Picovschi met à votre service ses 30 ans d’expérience en la matière.

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